Chaque jour ou presque, des avocats sont assassinés, portés disparus, torturés, arrêtés, menacés, poursuivis du fait de leur travail.
Parmi les pays les plus à risques pour les avocats aujourd’hui on peut compter la Chine, l’Iran, le Honduras, les Philippines, la Colombie, le Mexique, le Pakistan, le Mexique ou encore la Turquie. Les avocats les plus menacés sont ceux qui défendent des dossiers que l’on peut considérer dans un pays donné comme les plus « sensibles » pour des groupes d’intérêts puissants. Les dossiers « sensibles » varient d’un pays à l’autre mais on observe néanmoins des constantes comme par exemple la défense des journalistes et des bloggeurs, les dossiers d’expropriations, la défense des défenseurs des droits de l’homme, des opposants politiques, des syndicalistes ou la défense de victimes de torture par les autorités étatiques. ONG et institutions internationales en font le constat : la crise sanitaire mondiale a entraîné une multiplication des atteintes aux droits et aux libertés partout dans le monde. Les exactions se multiplient et être avocat n’a sans doute jamais été aussi dangereux.
Avec les journalistes, on peut considérer que la profession d’avocat est celle la plus menacée. Pour autant, les avocats ne se considèrent pas nécessairement comme des militants des droits de l’homme. Ils se reconnaissent avant tout comme des professionnels du droit et ne feront donc pas naturellement appel à des programmes pour les défenseurs des droits humains.
Il existe de nombreux instruments juridiques nationaux et internationaux rappelant le rôle essentiel des avocats notamment au travers du droit à un procès équitable, notamment la déclaration universelle des droits de l’homme adoptée en 1948.
Mais ce n’est qu’à partir de l’adoption des Principes de base relatifs au rôle du barreau lors du huitième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui s'est tenu à La Havane du 27 août au 7 septembre 1990, que l’avocat apparaît comme un « agent essentiel à l’administration de la justice ». Ces principes ont vocation à guider les Etats membres afin que les avocats puissent remplir leur mission en toute indépendance. Ils sont aujourd’hui encore le seul texte international qui protège véritablement les principes fondateurs de la profession, au premier rang desquels l’indépendance, la confidentialité, la liberté d’expression et la distinction vitale entre l’avocat et son client ou sa cause. Hélas, ceux-ci ne parviennent pas encore, ou pas toujours, à constituer une protection réelle pour de très nombreux avocats à travers le monde.
Il existe d’ailleurs une procédure spéciale aux Nations unies destinée à protéger les avocats. Il s’agit du Rapporteur spécial des nations unies pour l’indépendance des juges et des avocats.
Le Conseil de l’Europe participe également à l’harmonisation des règles relatives aux avocats, qui constituent un pilier essentiel de la garantie du droit à un procès équitable. Il a élaboré la Recommandation R (2000) 21 sur la liberté d’exercice de la profession d’avocat, dans laquelle figurent notamment des principes généraux sur la formation juridique des avocats et leur entrée dans la profession, les règles de déontologie, le rôle et les devoirs des avocats, les procédures disciplinaires ou l’accès de toute personne à un avocat.
Dans cet esprit, l’élaboration d’une convention sur la profession d’avocat est en cours au niveau du Conseil de l’Europe également. La Convention a pour but de renforcer l’état de droit et, par là même, la protection de l’avocat dont la mission est fondamentale dans l’administration de la justice et la sauvegarde des droits fondamentaux. Car harcèlement, menaces, emprisonnements, surveillance, disparitions forcées et meurtres d’avocats continuent de se produire dans de nombreux États du Conseil de l’Europe et sont même en augmentation dans certains d’entre eux. Un nouvel instrument est donc aujourd’hui nécessaire pour assurer une protection efficace de la profession d’avocat dont la mission est cruciale pour l’accès à la justice et la protection des droits humains et des libertés fondamentales, en particulier celle des droits de la défense et des garanties d’un procès équitable. Dernièrement, une résolution et recommandation ont été adoptées par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) pour appeler à l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant.
Enfin, le premier rempart de protection des avocats est de pouvoir compter sur le soutien d’un barreau indépendant. L’indépendance du barreau est un pilier de la protection de l’Etat de droit et des droits de l’homme. Identifier les avocats menacés à travers le monde, les recenser et surveiller attentivement l’évolution de leur situation et des menaces qui pèsent sur eux est nécessaire afin d’attirer l’attention internationale en tant que de besoin. C’est pour répondre à cette nécessité de manière concertée que le Barreau de Paris (France) aux côtés du Conseil national des barreaux (France), du Consejo General de la Abogacía Espanola (Espagne), et du Consiglio Nazionale Forense (Italie) ont décidé de fonder l’Observatoire international des avocats en danger afin de mener une veille permanente de la situation des avocats menacés dans le monde en raison de l’exercice légitime de leur profession.